Il est difficile de rester indifférent devant le grand événement advenu le 7 mai dernier de l’élection présidentielle en France dans l’actuel monde interplanétaire où les Etats subissent de quelque manière que ce soit et à quelque niveau que ce soit l’influence les uns des autres. Qu’on le veuille ou non, on est tous concerné, comme l’indiquait le bel adage et dicton latin légué par le poète Juvénal, à savoir “Homo sum, nihil humani alienum puto (Je suis homme, je pense que rien de ce qui est humain ne m’est étranger)”.

On peut supposer que c’est mû par de tells visions de l’universalité que le Prof. John Francis s’est prestement dispose à commenter le dit événement de l’élection présidentielle en France en acceptant d’en présenter des considérations utiles pour notre contexte de la RDC. C’est cette perception qui fait l’objet des confidences du déjà connu chroniqueur politique du site Digitalcongo.net en la personne du Prof. JF Mbala qui n’a pas hésité de s’étendre dans les extrapolations recueillies dans l’interview ci-après. En voici la teneur. 

Professeur John Francis Mbala, bien que séjournant présentement à Kinshasa, comment vous qui êtes résident en France percevez-vous la défaite de Nicolas Sarkozy et l’élection de François Hollande, le désormais Président de la République française ? 

Merci de m'avoir contacté pour m'exprimer sur ce moment historique, et cela d'autant plus que professeur en France, j’en connais les enjeux. D'ici à Kinshasa où j'enseigne également à la Faculté de Droit de l'Université Protestante au Congo, je constate que c'est avec intérêt et enthousiasme que nos compatriotes ont suivi la soirée électorale du 6 mai 2012 en France. Il y a lieu au préalable de féliciter M. François Hollande avec la déférence due à son rang dès lors qu'il est désormais Président de la République. Mais rappelons tout aussi vite que Nicolas Sarkozy restera à l'Elysée jusqu'au 15 mai 2012, le temps que l'alternance soit effective. 

Compte tenu de l'effort de concision, je vais esquiver les raisons de la victoire de l'un et de l'échec de l'autre, même si nous pourrons effleurer certains aspects. Pour nous Congolais, la question est plutôt : qu'est-ce qui va changer en bien pour nos frères et soeurs résidant en France ? Avant de tenter d'apporter quelques éléments de réponse et donc sans aucune exhaustivité, laissez-moi vous dire que, non pas seulement pour les Congolais, les Africains, mais de manière générale pour les étrangers vivant en France, c'est la joie ! 

En effet, peu à peu depuis 2007, le discours de Nicolas Sarkozy sous prétexte de rassurer les Français a glissé vers l'appropriation des thèmes dont le Front National, le parti politique d'extrême droite, a fait son cheval de bataille, à savoir l'immigration, le discours sécuritaire. Qu'il s'y soit attardé est dans ses attributions, cependant attiser la peur en brandissant l'immigration comme un danger par rapport à l'identité de la France a été perçu comme un discours populiste dans le seul but de capter les suffrages et/ou voix du Front national. 

Une sorte de « droitisation » de Nicolas Sarkozy, faisant des appels du pied à la droite de la droite, l'extrême droite. Ainsi donc l'échec de Nicolas Sarkozy ouvre la voie pour les étrangers à un traitement moins radical de leurs conditions de vie au-delà des questions relatives à leurs titres de séjour. Puisque visant la culture du résultat, des méthodes fort critiquables étaient mises en oeuvre par le Président Sarkozy, ce qui était déjà le cas quand il était Ministre de l'Intérieur. D'où la levée des boucliers de diverses forces associatives, généralement ancrées à gauche, ce au vu des discriminations observées ici ou là. 

Dans tout cela, il faut bien prendre de la hauteur, car au-delà de ces questions liées à l'immigration, c'est la volonté de changement incarnée par le discours de François Hollande qui l'a emporté. Volonté de changement sur le plan économique avec une économie appuyée, fondée sur des valeurs de solidarité, d'humanité et volonté d'évoluer vers une France qui rassemble et non qui divise, selon Hollande. 

Les Français n'ont pas choisi François Hollande essentiellement pour la politique d'immigration envisagée, à savoir favoriser l'arrivée d'étudiants étrangers, mais déjà pour mieux intégrer ceux qui y vivent, évoluer vers le droit de vote des étrangers non communautaires aux élections locales comme cela se fait en Belgique,  aux Pays-Bas ou en Allemagne. 

Les Français ont plutôt choisi Hollande parce que la crise internationale a dégradé considérablement le travail en France, participant à l'aggravation du chômage et/ou la précarité de l'emploi avec ses conséquences telles que la paupérisation de la population, l’évolution de manière exponentielle des working poor, en somme un sentiment d'insécurité réel. 

Si sur certains aspects relatifs à la politique extérieure Nicolas Sarkozy n'a pas démérité, il n'en demeure pas moins vrai qu'en matière de politique intérieure, il a accumulé des maladresses. On en prendra pour exemple notamment le slogan “travailler plus pour gagner plus”. Un tel slogan remettant en cause d'une certaine manière les 35h de travail a été mal perçu, tandis que les suppressions de postes sinon le non renouvellement des postes liés au départ en retraite sont des mesures que les Français viennent de rejeter par l'élection de François Hollande à la Présidence de la République. 

Il y a aussi le côté hyperactif de Sarkozy - son omniprésence dans les medias - qui a été perçu comme une sorte de politique-spectacle. Par rapport à François Hollande qui mettait l'accent non pas seulement sur l'identité de la France mais sur les valeurs de solidarité, de fraternité, Nicolas Sarkozy est apparu peu à peu dans l'opinion publique comme l'incarnation du capitalisme financier international, au-delà de son parcours dans un milieu aisé : Avocat de Profession, Maire de la ville huppée de Neuilly, etc. Autant de choses qui, dans un contexte de crise, a attisé la méfiance des Français qui le considéraient comme un président éloigné de leurs préoccupations. 

L'emploi, la sécurité, la santé, etc., il y a beaucoup à en dire. Si nous devons revenir à la situation des étrangers dont les Congolais de l'étranger, je pense que c'est plutôt la joie que l’élection de M. François Hollande soulève, puisque traditionnellement les Français d'origine étrangère votent à gauche comme il en de même dans la plupart des DOM. Du reste le discours de Nicolas Sarkozy le 26 juillet 2007, Discours dit de Dakar, a laissé des traces indélébiles dans l'imaginaire collectif des Africains. Pour rappel, M. Sarkozy déclarait que « l'homme africain » selon lui, ne « serait pas assez entré dans l'histoire... ». Discours colonialiste ? Raciste? C’est un tollé général qu’il avait soulevé avec levée de boucliers. Fermons la parenthèse.

La politique étrangère de la France à l'égard de l'Afrique en général et de la Rd Congo en particulier va t-elle connaître une inflexion vers une rupture avec la françafrique ? 

Dès lors que la présente contribution à l'éclairage des enjeux politiques en France, surtout leurs conséquences sur notre pays, s'adresse au grand public, il apparaît judicieux d'éviter un développement scientifique, même si l'exercice s'avère difficile. En quelques mots, je tiens à insister sur le fait qu'en matière de politique étrangère, c’est le concept d'intérêt national qui prévaut pour la France qui parle d'une seule voix. Ceci pour dire qu'au nom de la continuité de l'Etat, et fort de leurs intérêts dans le monde, le Président François Hollande va privilégier ces intérêts de la France. 

Diverses stratégies mises en oeuvre par son prédécesseur Nicolas Sarkozy, - realpolitik oblige – ne seront pas bousculées par François Hollande, même s'il reste qu'il aura toute latitude pour réorienter quelque peu la politique étrangère pour imprimer sa marque. Maintenant, les accords de coopération militaire sinon les réseaux secrets de business et/ou plus ou moins « occultes », en somme les relations privilégiés entre les Chefs d'Etat africains et l'Elysée, vont certainement connaître une inflexion dans le sens d'une rupture que je dirais de façade. 

Pour rappel, la Françafrique se rapportait à quelques pays dit du pré-carré français entretenant des rapports privilégiés, voire personnels, avec les différents chefs d'Etat. Ce pré-carré a été depuis démantelé… nuançons : presque déboulonné ! En fait les réseaux se sont reconstitués. La littérature est abondante sur la question. L'on se rapportera à propos des « affaires » aux ouvrages de Claude Gautier, sinon Pierre Péan, etc. 

En réalité la rupture que voulait instaurer Nicolas Sarkozy a buté sur des enjeux géostratégiques autrement puissants en raison des ressources naturelles telles que le pétrole dont disposent certains pays africains. C'est un secret de polichinelle que de souligner qu'un ministre français de la coopération - Jean-Marie Bockel pour ne pas le citer- sera déplacé (vers le Ministère des anciens combattants) à la demande de quelques chefs d'Etats africains parce que tout justement il avait osé déclarer la fin de ces rapports privilégiés. 

Avant lui Jean-Pierre Cot, alors ministre de la Coopération, avait connu les mêmes déboires pour des raisons analogues. Sans ennuyer les internautes sur les réseaux Foccart ou encore sa recomposition avec de nouveaux acteurs, pour ne pas nous attarder sur une notion relative à la prééminence de l'intérêt national sur la scène internationale et ce au nom de la raison d'Etat, penchons-nous donc sur la Rd Congo. 

Si le temps nous était donné, j'aurai procédé par une analyse discursive ou analyse des deux discours prononcés par le Président sortant Nicolas Sarkozy et l'autre par le Président élu François Hollande, pour relever que dans un cas comme dans l'autre, la France a un rôle à jouer dans le monde selon ces leaders. Elle tentera de garder son rôle de puissance. Il y a en filigrane, l'idée omniprésente de faire face à l'hégémonie des Etats-Unis d'Amérique et/ou le monde anglo-saxon. 

Brièvement voici ce qu'à déclaré François Hollande dans son discours quelques minutes après son élection en qualité de Président de la République : « Nous ne sommes pas n’importe quel pays de la planète, n’importe quelle nation du monde. Nous sommes la France. En tant que président de la République, il m’incombera de porter les aspirations qui sont celles de la France : la paix, le respect, la capacité de donner aussi aux peuples le droit de s’émanciper de la dictature. Tout ce que je ferai sera aussi au nom des valeurs de la République partout dans le monde. ». 

C'est un peu dans le même sens que quelques minutes plutôt Nicolas Sarkozy, alors battu, déclarait à la salle de la Mutualité à Paris dans son adresse aux Français que : « Nous devons ce soir uniquement penser à la grandeur de la France. ». Au jour d'aujourd'hui, la France a perdu un peu de sa superbe en tant que puissance et l'un des leviers de son rayonnement dans le monde reste la Francophonie qui n'est plus seulement une force culturelle mais désormais une force politique dans les instances internationales. 

Les pays ayant en partage la langue française vont fouler le sol congolais en octobre prochain dès lors que notre pays a été choisi pour abriter le XIVème Sommet de la Francophonie. J'avais il y a quelques temps fait la restitution de ce choix formidable dans vos colonnes ( http://www.digitalcongo.net/article/71162).  Les projecteurs seront braqués sur notre pays, et parmi les nombreux chefs d'Etat et délégations, nous accueillerons le Président François Hollande. 

C'est un merveilleux moment du point de vue du marketing politique, car nous pourrons mieux encore promouvoir les potentialités qu'offre notre pays, tandis que divers secteurs vont être dynamisés. Je pense aux infrastructures routières, parcs hôteliers, et autres édifices à ériger ou à réhabiliter. En corollaire il y a de formidables possibilités de création d'emplois. Certes, il y aura encore beaucoup à faire; mais l'élan enclenché pourra atténuer ce problème crucial eu égard à sa recrudescence. J'invite tous à effectuer des recherches sur le sens du mot externalité.

Parlons à présent de l'actualité nationale. Si des élections législatives sont prévues en France, en Rd Congo, l'institution Assemblée nationale vient d'être installée et est maintenant occupée à recevoir le Gouvernement pour son investiture. Quelle analyse en faites-vous ?

Certains analystes politiques éludent quelques préalables alors qu'il est toujours utile de ne pas confondre les concepts. Un projet de société ne doit pas être pris pour un programme de gouvernement. Le Président Joseph Kabila Kabange a été élu sur un projet de société dont le socle est la Révolution de la modernité. Cette vision du chef de l'Etat pour être mise en oeuvre nécessite un programme de gouvernement, lequel programme dans l'exécutif bicéphale sera mis en oeuvre par le Premier ministre choisi au sein de la majorité présidentielle. 

Contrairement au projet de société qui contient les grandes lignes, le programme de gouvernement qui s'en inspire - puisque nous ne traversons pas une situation de cohabitation - est plus précis et apporte, au-delà des données factuelles et diverses prévisions, les éléments ou modes opératoires qui seront mobilisés durant ce deuxième quinquennat du Président Joseph Kabila Kabange élu au suffrage universel direct. 

A mon avis, le Programme de Gouvernement sera voté et adopté par l'Assemblée nationale. Faut-il rappeler ici qu'il existe une concordance entre la majorité présidentielle et celle dite parlementaire. Ainsi donc, en dépit d'un débat démocratique nécessaire à l'Assemblée nationale sous la supervision du Président Aubin Minaku qui imprime d'ores et déjà un style nouveau, avant le passage au vote et l'éventualité de quelques amendements susceptibles d'être incorporés dans le document qui a été préalablement remis aux députés il y a quelques jours, il est fort à parier que le programme de gouvernement qui s'inspire de la Révolution de la modernité prôné et voulue par le Chef de l'Etat sera adopté. D'où l'investiture du Gouvernement. 

Ainsi, le Premier ministre ayant désormais l'effectivité du pouvoir entrera en fonction. Personnellement, je me réjouis qu’il se soit dégagé à l'Assemblée nationale une majorité politique qui coïncide avec la vision du Chef de l'Etat, le président Joseph Kabila Kabange. Voyez-vous : s'il s'agissait d'une cohabitation, c'est la politique du Premier ministre leader de l'opposition qui aurait été mise en oeuvre. Pour exemple : si nous revenons à l'actualité politique en France, il est souhaitable que les élections législatives qui s'y tiendront dans un mois apporte au Président François Hollande une majorité confortable afin qu'il puisse mettre en oeuvre son projet de société. La cohabitation est un exercice politique constitutionnel, certes, mais jamais facile. 

La première cohabitation de la Vème République en France ( 1986-1988) entre le Président François Mitterrand et Jacques Chirac alors Premier ministre fut par moment houleuse. Par exemple, à propos de la diplomatie qui fait partie du domaine réservé du Chef de l'Etat, lors de certaines rencontres dans les instances internationales, en sa qualité de Premier ministre et chef du Gouvernement, Jacques Chirac s'est imposé dans les voyages, assistant à la tribune. Non pas pour afficher une discordance puisqu'en matière de politique étrangère la France parle d'une seule voix, mais pour acquérir un peu plus une dimension internationale. Lors de la deuxième cohabitation ( 1993-1995), Edouard Balladur alors Premier ministre abondera dans le même sens.

Le Gouvernement du Premier ministre Matata Ponyo a fait de l'amélioration du social sa priorité, quelles sont ses chances de réussir, selon vous ?

Il est présentement prématuré de s'aventurer à nous appesantir sur les chances de réussir du Premier ministre Matata Ponyo à qui nous réitérons nos très sincères félicitations pour son élévation. Nonobstant, ses qualités intellectuelles et professionnelles au-delà de son parcours à la Bceco et au Ministère des Finances nous laissent dire que, eu égard à la composition de l'équipe comprenant pour l'essentiel des technocrates dont il s'est entouré, ajouter les méthodes managériales qu'il envisage d'instaurer – telle l'évaluation régulière – le social pourra s'améliorer. 

Personnellement, j'aurai posé la question autrement, à savoir : que doit éviter le Premier ministre pour ne pas échouer dans la mission lui confiée par le Président Joseph Kabila Kabange ? La question du social est récurrente, quasi permanente. Dans le programme du gouvernement 2007-2011, elle était présente voire dans d'autres documents antérieurs. L'année 2010 avait été déclarée année du social. Nous sommes en 2012, qu'en est-il ? 

Les questions liées à l'emploi, à la santé, à l'insécurité ont connu des avancées notables. Une corruption endémique a compromis les réelles possibilités de décollage économique. D'où la persistance du chômage en plus des problèmes d'approvisionnement en eau, de fourniture d’électricité dans les agglomérations urbaines; etc. Ce n'est pas par fantaisie que dans la nouvelle mouture gouvernementale il existe un poste de ministre délégué aux Finances rattaché à la Primature. 

Il s'agit d'arrêter, selon certains, ce qui s'apparenterait à une « hémorragie financière » et/ou une politique prédatrice des deniers publics illustrée par un rapide enrichissement illicite de certains politiques et ce au détriment du peuple, du social. Maintenant au-delà de l'architecture gouvernementale, la nouvelle équipe doit s'atteler à la tâche dont l'une des priorités est le vote du budget, mieux l'assainissement du circuit économique relatif aux recettes de l'Etat, parce que le gouvernement doit avoir les moyens de sa politique. 

Si la rigueur préconisée est une piste, il faudra qu'elle soit comprise par la population. J'ai envie de dire that's the question ! Ce que le Premier ministre et son équipe devront éviter pour ne pas échouer, c'est de tenir à l'écart la population en ne l'informant que de manière minimale sur les mesures qui seront mises en oeuvre. Autrement dit, il serait souhaitable que l'équipe ministérielle – pas seulement Matata Ponyo – communique encore et encore davantage, pour expliquer à la population le bien fondé de la rigueur budgétaire qui sera instaurée. 

En somme il vaudra mieux éviter la rigueur pour la rigueur en donnant un sens à ses discours et ses actions. Certes, le Premier ministre est un technocrate mais il est aussi un politique, puisque membre du PPRD. A présent il doit l'être un peu plus en se faisant mieux connaître. Il lui faut à terme communier avec le peuple, avec les forces vives de la Nation qui porteront et mettront en oeuvre la Révolution de la modernité, concept qui n'est pas antinomique avec les cinq chantiers. 

Si je devais offrir au Premier ministre Matata Ponyo un ouvrage sinon en proposer, ce serait celui de Max Weber, ouvrage intitule “ Le savant et le politique”, un essai paru en 1959 et préfacé par Raymond Aron. A mon humble avis, le Premier ministre Matata Ponyo bénéficie d'une confiance du Chef de l'Etat et de la majorité parlementaire. En clair il jouit d’une bonne période de grâce. La majorité parlementaire lui apportera son soutien dès lors que des réalisations à impacts visibles en direction de la population seront constatées. 

Dans le cas contraire, les politiques – essentiellement les chefs de partis politiques dont les désidératas n'ont pas été écoutés par le Chef de l'Etat – et surtout la presse, ne se priveront pas de tirer à boulets rouges - de manière feutrée - sur le gouvernement dont il faut souligner qu'il n'hérite pas d'une tâche facile dès lors que le pays a fonctionné au ralenti de par le fait que l'attente durant sept mois d'un gouvernement a conduit les intérimaires à évacuer les affaires courantes. 

Quelque part, au-delà des potentialités inhérentes à ceux qui animent les institutions, il aurait été souhaitable ainsi que je l'ai souvent proposé ( http://www.digitalcongo.net/article/83047 ) que les Congolais de l'étranger soient associés de manière concrète à la Révolution de la modernité pour la booster, mieux, lui donner un coup d'accélérateur.

Donc, selon vous, la Révolution de la modernité peut être boostée par les Congolais de l'étranger en général dont ceux de la France en particulier. Quels sont vos arguments ?

Il faut d'emblée lever une équivoque et donc sans ambiguïtés précisons. En effet, il existe en Rd Congo des hommes et des femmes compétents, patriotes qui participant déjà à l'évolution vers un Congo émergent. Cependant, les grandes nations se sont développées aussi en associant leurs ressortissants résidant à l'étranger et/ou leurs diasporas ( Israël; Liban..). Je ne doute pas que tôt ou tard le Premier des élus, j'ai cité le Président de la République Joseph Kabila Kabange, se penchera davantage sur la question. 

Déjà, en 2007, un poste de Vice-ministre de l'étranger avait été créée sous son impulsion et il a à coeur de travailler avec tous les Congolais qui ont la passion du Congo. Cependant et nous devons l'intégrer tous, il a toute latitude pour exercer ses choix en vertu de son pouvoir discrétionnaire. Ceci pour dire que la suggestion, mieux le projet dont je fus porteur déjà en 2006, projet intitulé “Ministère des Congolais de l'étranger et de l'Intégration régionale” peut demain se concrétiser, puisque les Congolais qui ont la passion du Congo sont également nombreux à l'étranger. 

J'ai enregistré de nombreuses doléances depuis quelques années allant dans le sens de ce souhait, voire de me voir dans les institutions. Si cela est un souhait légitime, ainsi que je l'ai toujours précisé en toute humilité, je suis relativement jeune, constituent une réserve de la République, et les institutions ne se limitent pas au gouvernement dès lors qu'il faut prendre en compte la gestion des entreprises publiques. Quelle que soit l'institution, nos aspirations ne doivent être que de servir pour améliorer le social et participer dans le cadre de la révolution de la modernité à l'évolution vers un Congo émergent. A mon avis, ce social apparaît comme un thème galvaudé et jeté en pâture dans les discours. Au fait, qu'entend t -on par le social ? Il s'agit d'une notion polysémique voire protéiforme. En tous les cas, il fait référence à l'épanouissement de l'être humain, la valorisation du capital humain. 

Nous allons éluder dans nos propos la question relative au système social sinon le système de redistribution et/ou la justice sociale puisque vous me signalez que nous arrivons au terme de notre interview. Ouvrons la parenthèse sur une conception basique du social. Le social, renvoie aux besoins primaires: se nourrir, se vêtir etc. Il s’agit des besoins vitaux à l'existence humaine. Si ce minimum vital n'est pas assure, alors l'individu se trouve confronté à des inquiétudes qui compromettent son désir de s'épanouir, de bien-être. 

Pour satisfaire ces besoins primaires qui s'opposent aux besoins secondaires ( avoir un téléphone, une voiture etc.), les sociétés contemporaines valorisent le travail, mieux exaltent les rapports marchands. Or l'inadéquation entre l'offre et la demande sur le marché du travail participe à l'instauration durable, voire l'aggravation du chômage à tel point que plus qu'une paupérisation de la population, la misère se dilate dans diverses sphères de la couche sociale. 

Si pour y faire face, l'Etat congolais doit tenter de se conformer aux exigences des institutions de Bretton Wood et celles des partenaires économiques dans le cadre des relations bilatérales et/ou inter étatiques d'où l'annulation de la dette dans le cadre des PPTE, l'un des leviers qui peut booster la Révolution de la modernité réside dans le potentiel de nos ressortissants expatriés à travers la planète. Brièvement, ouvrons sur deux volets. 

S’agissant du premier considérons qu’à Kinshasa la capitale comme dans plusieurs villes, les Congolais pour se rendre au travail ont recours pour la plupart aux transports en commun, la question qui vient est qui sont propriétaires des véhicules sinon du moins qui ont acheminé depuis l'étranger ces moyens de transport pendant que le gouvernement de la Rd Congo ne dispose pas de société de transport en commun au vrai sens du terme. Lorsque les familles résidant en Rd Congo sont frappées par un deuil ou simplement déjà en cas de maladie, d'où provient une partie de la contribution financière ? 

Dans un autre registre, dès lors qu'il s'agit de fêter un baptême, un mariage ou organiser des cérémonies quelconques telle une collation de grades académiques au terme d’une formation scolaire, les Congolais résidant dans la mère patrie ne comptent-ils que sur leurs propres ressources ? Ceci pour souligner que par l'envoi de produit en tout genre vers la Rd Congo ( importation produits alimentaires, pharmaceutiques..), transfert de fonds, les Congolais de l'étranger participent pour beaucoup au soulagement de la population et donc au social. A mon humble avis par l'OHADA et l'ANAPI il y a lieu de poursuivre l'élan vers l'amélioration du climat des affaires pour rassurer les investisseurs étrangers. 

Lorsque l'on se réfère aux investisseurs il y a à admettre qu’il est souvent fait appel en direction des occidentaux. Or il existe à travers le monde des Congolais millionnaires en dollars, des personnes fortunées à même de pouvoir venir en Rd Congo booster la Révolution de la modernité, s'ils sont véritablement associés et encadrés. A terme, il y aura lieu de vraiment se pencher sur les préoccupations de la diaspora au risque de grossir les rangs des aigris et « combattants » à l'étranger qui s'en prennent injustement aux paisibles citoyens soutenant la vision du Raïs Joseph Kabila Kabange. 

Deuxième volet : il faut considérer que l'expertise acquise par la diaspora est une potentialité qui peut enrichir le capital humain congolais. De l'avis de beaucoup, le volet sécurité pose une inquiétude. La sécurité des biens et des personnes est certes une des priorités des gouvernements successifs, mais si un cadre institutionnel viable émerge véritablement, cela ne pourra que rassurer davantage les Congolais de l'étranger. Dans l'immédiat, nous devons apporter tous notre soutien au Premier ministre Matata Ponyo, même si l'alternance et le renouvellement de la classe politique sont des pilules difficiles à avaler pour certains politiciens congolais

Que voulez-vous dire par l'alternance et le renouvellement de la classe politique qui seraient des pilules amers à avaler pour les politiciens congolais ?

Voyez-vous : le Sénégal nous a offert il y a peu un bel exemple de démocratie. Avec élégance, le Président sortant Abdoulaye Wade avait reconnu sa défaite face à Macky Fall. Quant à nous ici en Rd Congo, l'alternance politique souffre d'un déficit caractéristique de par l'obstination de certains acteurs politiques à ne pas reconnaître le scrutin du 28 novembre 2011. Heureusement que de nombreux députés dits de l'opposition ont désavoué ces méthodes d'un autre âge en acceptant de siéger à l'Assemblée nationale. 

Qu'on se le dise : les données sont irréversibles, c'est avec le président élu Joseph Kabila Kabange qu'il faudra compter. Voyez comment en dépit de sa défaite, Nicolas Sarkozy a voulu sortir par la grande porte avec la qualité d'homme d'Etat en déclarant dans son discours du 6 mai 2012 que : « La France a un nouveau président de la République, c'est un choix démocratique républicain, François Hollande est le président de la France, il doit être respecté (…..) Je viens de l'avoir au téléphone, et je veux lui souhaiter bonne chance au milieu des épreuves”. 

Et Nicola Sarkozy de poursuivre an ces termes significatifs : “Je souhaite de tout coeur que la France qui est notre pays, qui nous rassemble, réussisse à traverser les épreuves, car il y a quelque chose de beaucoup plus grand que nous, c'est notre pays, c'est notre patrie, c'est la France. ». Certes, il faut se garder de toute comparaison compte tenu du fait que l'histoire de la France ne doit pas être confondue avec la nôtre. Mais nous pouvons, nous devons nous inspirer de cette culture politique. Changer nos mentalités. 

Tel est aussi le sens de la Révolution de la modernité. Au-delà de l'alternance, si nous évoquons la question relative au renouvellement de la classe politique, là aussi l'ascension - voulue par le Président Joseph Kabila Kabange - d'une nouvelle génération de par l'âge physique a été diversement appréciée par certains leaders politiques qui s'estimaient inamovibles. Or, le Président de la République Joseph Kabila Kabange dispose d'un pouvoir discrétionnaire qu'il vient d'exercer et qui prouve qu'il a l'impérium ou la réalité du pouvoir, l'Autorité suprême.


Confidences recueillies par Daniel Nzuzi/MMC