Le président Joseph Kabila est arrivé lundi à Goma, chef-lieu de la province du Nord-Kivu dans l'Est du pays qui est à nouveau sous les bruits des bottes avec la défection signalée depuis quelques jours dans les rangs des FARDC de plusieurs officiers ex-rebelles CNDP.

Le Chef de l’Etat a été accueilli à sa descente d’avion à Goma par le chef d'état-major des forces armées congolaises, le général Didier Etumba, qui l'avait précédé de quelques heures, de même que par le Vice-gouverneur de province, M. Fuller Lutaichirwa Mulwahale, représentant son titulaire Denis Paluku absent pour raison de mission à l’étranger. Les observateurs qui ont suivi ce déplacement du président de la République notent qu’aucune information officielle n'a été donnée jusqu’ici sur les raisons de cette présence du Chef de l’Etat à Goma.

Tous les recoupements indiquent toutefois qu’il pourrait bien s’agir pour le premier Congolais de descente sur terrain pour suivre de près la situation créée par la défection constatée au début de ce mois d’avril dans le Nord et le Sud-Kivu d'une dizaine d'officiers supérieurs, ex-membres de la rébellion du Congrès national pour la défense du peuple (CNDP), qui auraient abandonné leurs postes en partant sous d’autres cieux avec derrière eux quelques centaines d'hommes.

Ces officiers sont des proches du général Bosco Ntaganda, ex-chef d'état-major du CNDP, intégrés comme lui dans l'armée régulière (FARDC) au début de l’année 2009, après un accord de paix conclue entre cette rébellion et Kinshasa.

Bosco Ntanganda au coeur de la tension

Selon un porte-parole des FARDC à Goma, plusieurs officiers ont déjà réintégré leurs unités ou se sont rendus, mais seuls cinq d’entre eux encore en cavale seraient toujours traqués par les forces loyalistes.

Basé à Goma, le général Ntaganda, connu aussi sous le surnom de Terminator, est visé depuis 2006 par un mandat d'arrêt de la Cour pénale internationale (CPI) pour enrôlement d'enfants quand il était dans une autre milice au début des années 2000.

Jusque-là Kinshasa n'a jamais voulu l'arrêter, arguant que la paix dans la partie Est prévalait sur la justice. Le procureur de la CPI, Luis Moreno-Ocampo, a récemment annoncé qu'il allait demander un nouveau mandat d'arrêt contre le général Bosco Ntanganda pour des crimes supplémentaires de viols et meurtres, commis, selon des ONG des droits de l'homme, quand il était au CNDP et depuis son intégration dans les FARDC.

Selon un correspondant de l’Agence-France-Presse (AF¨) qui avait rencontré Bosco Ntanganda chez lui à Goma vendredi, cet officier ex-chef rebelle CNDP recherché par la CPI avait déclaré qu'il n'avait pas peur. Selon une source FARDC, il se trouverait actuellement dans sa ferme dans le territoire de Masisi (Nord-Kivu), l'un des anciens fiefs du CNDP.

Officiellement chargé de l'intégration des ex-rebelles, Bosco Ntaganda serait en fait le numéro 2 des opérations de l'armée congolaise, appuyée par la Mission de l'ONU en RDC (Monusco). Il s’agit d’opérations menées depuis 2009 contre des groupes armés étrangers et locaux toujours actifs dans les deux Kivu, où les civils sont victimes d'exactions et condamnés à des déplacements incessants pour fuir les violences.

Dans un rapport publié fin 2011, des experts mandatés par l'ONU notaient la persistance, dans l'Est de la RDC, de structures de commandement parallèle (au sein des FARDC) dans lesquelles le général Ntaganda joue un rôle de plus en plus important.

Terrorisme et sabotage perpétrés par les hors-la-loi

S’agissant des défections proprement dites signalées, on compte dans le groupe d’officiers qui auraient récemment pris le large le commandant de la 8ème région militaire, en l’occurrence le Général de Brigade Vainqueur Kyama Mayala.

Il sied de signaler aussi en passant que le commandant du 805ème régiment des Forces armées de la RDC (FARDC) du camp de Nyongera, en territoire de Rutshuru au Nord-Kivu, le colonel Innocent Kayina, a également fait défection dans la nuit de samedi 7 avril.

Selon des sources militaires, cet officier a emmené avec lui avant de détaler quelque soixante-dix hommes et détruit deux jeeps neuves appartenant aux militaires des FARDC de même qu’un dépôt de munitions. Les mêmes sources renseignent que, sur place à Nyongera, des militaires loyalistes ont commencé à regagner le camp depuis ce dimanche 8 avril.

Quant aux installations de dépôt de minutions, il est constaté qu’elles sont complètement endommagées. On peut encore y apercevoir de carcasses des camionnettes, des armes lourdes et des minutions déjà détruites.

Le commandant du 2è secteur des FARDC, le colonel Yav Philémon, est revenu sur l’ampleur du dégât causé par le colonel Innocent Kayina et ses complices pour informer que le déserteur a brulé une jeep neuve du commandement du 805ème régiment et une autre jeep du commandement 804ème régiment. Il a aussi endommagé le mortier 105 mm, le mortier 81, les armes lourdes et les armes d’appui telles que 12.7.

Il a indiqué que juste derrière le bâtiment endommagé, quelques boites des munitions restées intactes sont placées sous la surveillance des militaires loyalistes.

Le colonel Yav Philémon a, par ailleurs, appelé la population locale à vaquer librement à ses occupations, espérant que les fauteurs de ce sabotage seront rattrapés et traduits en justice. Depuis cet appel, la population apaisée, vaque librement à ses occupations journalières.

A noter à titre de rappel que les détonations de ces armes samedi 7 avril vers 20h 30 ont provoqué une panique au sein de la population qui a quitté les périphériques du Camp Nyongera pour se diriger vers le centre ville et le camp des militaires onusiens toujours dans la cité de Kiwanja.

Bien que rien n’a été dit sur le séjour actuel du président Joseph Kabila dans la partie Est de la RDC, les sources dignes de foi renseignent qu’il va s’atteler au problème sécuritaire en province causé par la défection de certains officiers des FARDC.

C’est la première visite du Chef de l’Etat dans cette région depuis sa réélection à la tête du pays en novembre 2011 pour un mandat de 5 ans. Il est évident que cette présence du Chef de l’Etat à l’Est du pays va sans nul doute renforcer l’apaisement des esprits des populations locales.

MMC